Ce massif du centre de la Corse se ramifie en trois branches dont deux se prolongent loin en direction du sud et du sud-ouest. Il s’articule autour du col de Verde (1289 m), emprunté par la RD69, et véritable centre de gravité qui commande l’accès intérieur aux montagnes composant cet ensemble. Depuis son point culminant, le Monte Renosu (2352 m), quand il n’est pas noyé dans le brouillard, la vue panoramique englobe une grande partie de l’île. Bien que son substrat soit constitué presque exclusivement de roches granitiques, le massif se singularise par la richesse de ses paysages, tenant autant à la diversité de sa géomorphologie qu’à la variété de ses milieux naturels (1-Vue sur le massif depuis la Bocca dell’Oru à l’est du col de Verde. 2. 3).
Ses versants et hautes vallées abritent quelques-unes des plus belles forêts de l’île, de surcroît bien représentatives des écosystèmes forestiers d’altitude : une partie de la forêt de Vizzavona au nord-ouest, avec ses magnifiques futaies de pins laricio ; à l’ouest la dense hêtraie qui domine la vallée de la Gravona au-dessus de Bocognano, ainsi que la hêtraie et la sapinière de Punta Niella ; la hêtraie de Stragonato au sud-ouest ; enfin, sur le flanc est, de part et d’autre du col de Verde, les forêts de la Flasca, de Sant’Antone, de Ghisoni, de Marmano-Petra Piana, et les parties hautes des forêts du Fium’Orbu. A l’étage supérieur, les larici ou les hêtres isolés, sculptés par le vent, prennent parfois l’allure de monuments naturels (4-5-6).
Les reliefs ne sont pas en reste, qui déclinent à peu près toute la palette de formes et de figures de la montagne corse. Cimes majestueuses taillées en dômes ou en aiguilles (Punta dell’Oriente, Pinzi Corbini…), ou bien plus trapues comme les sommets de l’intérieur du massif (7).
Crêtes rocheuses effilées ou usées par l’érosion(8). Vallées forestières profondes et encaissées (9). Vallées suspendues au profil en auge, abritant comme sur le site d’I Pozzi d’exceptionnels ensembles de pozzines, ces formations de tourbières qui composent d’étonnants jardins aquatiques (10-11). Hauts plateaux tapissés de landes et pelouses d’altitude, tel le Pianu d’Ese (12).
Mais aussi des cirques et cuvettes glaciaires recelant des lacs de montagne à différents stades évolutifs – du lac profond et minéral aux minces plans d’eau sertis de vertes pelouses humides. Bastani, Pizzolu, Niellucciu, Bracca, Vitalaca, Valle Longa, Rina, ces pièces d’eau sont autant de miroirs qui reflètent les humeurs du ciel et les visages contrastés de la montagne (13-14-15).
Au cœur du massif, on trouve sur les replats sommitaux et versants d’adret de véritables déserts alpins, froids et relativement secs car battus par les vents, mais aussi sujets à de fortes variations thermiques, des brouillards glacés pouvant succéder à une insolation intense en l’espace de quelques minutes. Ainsi, le sommet du Monte Renosu n’est qu’un désert de pierres anguleuses, sur une matrice de gravier qui donne aux pas du marcheur une résonance métallique ; une flore maigre et discrète, comprenant plusieurs espèces endémiques à forte valeur patrimoniale, a su s’adapter à cet univers minéral (16-17).
L’agropastoralisme est encore bien vivant. De nombreux troupeaux paissent l’été dans les herbages du massif. Même si les estives ne sont plus très nombreuses, les vastes étendues de pozzines, pelouses et fruticées permettent d’accueillir un cheptel varié (18).
De nombreuses bergeries jalonnent les pâturages d’altitude. On relève aussi dans cet ensemble la présence de deux stades de neige en activité. Les pistes de la station de Val d’Ese, sur le plateau du même nom, traversent une partie des pelouses humides qui sont l’une des richesses naturelles du site ; l’accès par la route se fait depuis Bastelica et la vallée du Prunelli. Sur le versant nord-est du Renosu, le stade de neige de Ghisoni, aux dénivelés plus marqués, est accessible à partir du col de Verde. Les nombreux impacts sur les paysages des infrastructures et aménagements liés à ces stations apparaissent surtout lorsque la neige disparaît (sols décapés, ravinements, érosion…) (19-20).
C’est bien sûr en été que les activités de randonnée sont les plus importantes. Le massif est très fréquenté, en particulier du fait de la présence des routes menant aux stations de ski, qui permettent aux véhicules de grimper à plus de 1600 mètres d’altitude. De multiples sentiers sillonnent également les montagnes, dont le GR20 qui chemine sur les crêtes de Prati-Usciolu et les versants orientaux du Monte Renosu. Les sites les plus remarquables et les plus fragiles – I Pozzi, Pianu d’Ese, lac de Bastani – sont aussi ceux qui connaissant la fréquentation la plus forte (21).