Atlas des paysages

de la Corse

5.02 - Bastia - Marana

Les communes de l'ensemble paysager

Furiani, Borgo, Biguglia, Lucciana, Bastia, Ville-Di-Pietrabugno, Rutali, Barbaggio, Poggio-D’oletta, Oletta, Olmeta-Di-Tuda

L’ensemble Bastia Marana s’organise sur un axe nord-sud, entre le rivage de la mer Tyrrhénienne et les crêtes qui relient la racine du Cap Corse aux piémonts de la Castagniccia. L’entité articule deux univers très différents : la partie nord se rattache au Cap, tandis que la plaine et les versants de la Marana font partie de la plaine orientale. L’unité du paysage est donnée par les premiers hauts sommets de la Serra di Pignu et l’urbanisation bastiaise, visibles de partout. Il existe par ailleurs une continuité de perception depuis les contreforts de la Castagniccia jusqu’à la ville. Les grands motifs (montagne plaine, étang, côte) convergent tous vers la citadelle de Bastia, juchée sur son éperon comme l’accroche sommitale de la plaine de la Marana.

Autre trait singulier, cet ensemble réunit l’un des principaux secteurs d’urbanisation de la Corse, l’agglomération bastiaise, et l’un de ses écosystèmes majeurs, l’étang de Biguglia. Ce dernier apparaît comme le grand monument naturel de cette partie de l’île. Vu depuis la montagne et le piémont, l’étang semble appartenir à deux mondes : celui de la mer, par sa surface d’eau et la plaine qui la prolonge ; et celui de la terre, à travers les rivières et les ruisseaux qui lient la lagune à la montagne et le cordon littoral qui la sépare de la mer. Il est exceptionnel de pouvoir bénéficier depuis la terre ferme de telles vues sur une plaine littorale et son système lagunaire. Les villages des versants les ont pour spectacle permanent. La présence de la ville et la pression urbaine présentent quant à elles une gradation qui s’exprime dans l’occupation du sol et diminue en allant vers le sud. L’urbanisation se développe selon un double mouvement. Depuis Bastia et la RN 193, elle monte en nappe vers les collines qui prennent un caractère de campagne habitée ; et elle s’étend le long du littoral, où l’espace constructible est extrêmement étroit, avec une dominante de villégiature touristico-balnéaire.

L’ensemble se construit ainsi autour de deux systèmes d’organisation de l’espace et des circulations. Le premier est géographique, avec l’étang et ses cours d’eau et canaux qui l’alimentent (convergence naturelle) ; le deuxième est lié à l’homme, avec Bastia, son réseau de dessertes routières, ses extensions périurbaines. L’expansion du second tend à effacer les éléments et motifs du réseau hydrique naturel (vallons, cours d’eau, ripisylves…). Ces deux grands systèmes structurants s’ignorent le plus souvent. Les jets de l’aéroport de Bastia-Poretta et les oiseaux aquatiques qui fréquentent la lagune se côtoient presque à se toucher, sans faire grand cas les uns des autres.
La principale dynamique paysagère reste néanmoins le jeu d’échanges entre les versants montagneux et la plaine avec sa piaghja, entre la verticale et l’horizontale. Ce contraste entre deux mouvements antagonistes fait partie des formes attendues des paysages corses, mais il prend ici une intensité particulière. Les liens visuels s’établissent transversalement, entre plaine et montagne. Mais ces éléments ne s’opposent pas, chacun forme un fond qui met l’autre en valeur ; ils entrent en résonance, à la manière des chjame è rispondi, ces joutes poétiques improvisées dans lesquelles deux chanteurs tour à tour s’appellent et se répondent. Un dialogue subtil, néanmoins troublé par la présence du « couloir urbain » qui occupe la charnière entre le plan vertical et le plan horizontal.

Bloc diagramme 3D

Sources - IGN / Ortho HR Janvier 2021 / RGE Alti 2020

5.02

A - Ville de Bastia

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Unités paysagères

A Bastia, la citadelle érigée par les Génois à la fin du XIVème siècle, sur un rocher dominant la marine de Cardo et son village de pêcheurs, a donné son nom à la ville. Sur cette hauteur s’est nichée la ville fortifiée génoise – Terra Nova – avec son palais des gouverneurs, ses églises et ses casernements. Au pied de la forteresse, autour de Porto Cardo, la ville basse – Terre Vecchia – était celle des artisans corses et des commerçants italiens. C’est à partir de ce noyau historique que Bastia s’est progressivement agrandi, dans l’espace étroit laissé libre entre mer et montagne : sur les pentes et vers le nord, où se concentrent les quartiers résidentiels, avec leurs immeubles et villas arrimés aux premiers reliefs du Cap Corse ; et vers le sud, où les quartiers populaires se prolongent par une périurbanisation qui s’étend autour de l’étang de Biguglia dans la plaine de la Marana, jusqu’à l’aéroport.

« Du haut de la terrasse j’ai revu la baie avec toutes les côtes qui l’entourent. La lune en face se reflétait dans les flots ; suivant qu’elle montait dans le ciel, son image prenait sous l’eau des formes changeantes […] Les montagnes étaient éclairées, et de l’autre côté, au large, à travers les ombres, la grande immensité azurée apparaissait toute sereine. »

Gustave Flaubert, Notes de voyage en Corse, 1840

« Bastia, tout à fait différente de la paisible, pour ne pas dire languissante Ajaccio […] Ici, un monde en ébullition. Une avenue spacieuse pavée de dalles toscanes, ornée de drapeaux, bordée d’imposantes bâtisses récentes vous transporte à Leghorn ou à Naples […]. Les larges artères, le nouveau quartier où se dressent des immeubles en pierre, d’une grâce imposante, constituent la partie supérieure de la cité. »

Edward Lear, Journal d’un paysagiste anglais en Corse, 1868

« Nous regardions ce paysage, dont les détails se multipliaient à mesure que nous montions, mais qui restait le même et magnifique : la mer à notre gauche, toute fouaillée et charruée par la bourrasque ; une bande de terre inculte ; l’étang de Biguglia, immobile et terne comme du mercure oxydé ; plus près de nous, la plaine, et, au-delà, les montagnes qui se levaient. »

René Bazin, Promenades en Corse, 1913

Paysages urbains

Une approche et une échelle spécifiques : du paysage de la ville aux paysages urbains 

Les villes de Corse correspondent dans l’atlas à des unités paysagères, incluses dans ces territoires plus larges que recouvrent les ensembles de paysages. A l’échelle de l’ensemble, la perception de la ville renvoie à la veduta (peinture d’un paysage de ville ou panorama, genre apparu au 16e siècle) : c’est-à-dire la représentation d’une « ville-campagne » dans laquelle les lieux construits se laissent embrasser du regard, saisis dans leur totalité dans un contexte paysager plus large. Cette appréhension lointaine de l’entité urbaine, dans un regard globalisant, caractérise le « paysage de la ville ».

Les types de paysages urbains

Le paysage urbain s’exprime en termes de paysages perçus et vécus, car il traduit l’articulation du volume et de la matière, du physique et de l’humain. Du fait de la partition de l’espace de la ville, la perception de ces paysages suppose à la fois la vision d’éléments constants, de l’ordre du motif (ceux qui, par répétitions, rendent le tissu bâti homogène), et d’éléments singuliers (ceux qui par leurs formes, leurs fonctions ou leur position, se distinguent du tissu urbain). La définition des types s’est donc construite en référence à l’histoire des villes, aux démarches architecturales et urbanistiques qui s’y sont inscrites dans le temps, mais aussi à l’appropriation du lieu, aux ambiances qui s’en dégagent, renvoyant à la notion de « regard » – ce regard qui fait de la ville un paysage. Ainsi, deux fragments de ville édifiés selon un mode d’occupation de l’espace semblable, peuvent donner à lire deux paysages urbains différents. En Corse, le relief spécifique de l’île vient enrichir fortement la palette des combinaisons possibles.

  • 1 - La ville ancienne

    Paysage emblématique de Bastia, la ville ancienne, par sa morphologie et son implantation dans le site, accentue le dialogue entre masses bâties et espace maritime, entre plans verticaux et étendue bleue horizontale. La ville haute (la citadelle et l’ancien faubourg du quartier Saint-Joseph) domine la mer de 50 mètres. La ville basse (le vieux port autour de son plan d’eau et le quartier du marché), en contrebas, se situe juste au-dessus du niveau de l’eau. Au-delà du mur d’enceinte de la citadelle, qui descend doucement vers le rivage en soulignant le promontoire rocheux sur lequel il s’inscrit, au-delà des jetées du vieux port qui laissent entrevoir les mâts des bateaux, et de la promenade du quai des martyrs prolongeant la place Saint-Nicolas, un bâti dense trouve place.

    Depuis le quartier Saint-Joseph, au sud, jusqu’aux limites de la ville basse, plus au nord, le paysage urbain est animé par la mosaïque des façades ocres et rouges qui masquent les toits dans la ville haute ; par le jeu des couleurs d’enduits, des ouvertures, des balcons petits ou grands et des toitures étagées, sur le vieux port et le marché. Les rues et ruelles étroites, tirées au cordeau lorsque la topographie le permet, s’y faufilent. Escaliers, places et placettes de tailles et géométries diverses s’y dessinent. Le caractère de ce paysage est fortement identifiable, même si le bâti s’est développé en respectant les lignes de relief préexistantes, très peu modifiées. Le quartier du marché forme un trait d’union entre la ville « enclose » dans les murs de la citadelle, et la ville ouverte du XIXe siècle, qui s’étend vers le nord. Nombre de rues sont implantées selon un axe est-ouest et offrent ainsi des ouvertures vers la mer, mises en relief par la déclivité des voies.

    En arrière du bâti du quartier Saint-Joseph, des petits jardins prolongent les immeubles. Sous la citadelle, le jardin Romieu aménagé au XIXe siècle, largement planté, offre un lieu de promenade piétonne et ramène de la ville haute vers les quais du vieux port où s’ouvrent les terrasses des cafés et restaurants.

    Dans l’ensemble paysager ainsi constitué, par dessus les toits, le clocher de la cathédrale Sainte-Marie dans la citadelle, et ceux de l’église Saint-Jean au marché, poursuivent leur conversation séculaire.

  • 2 - La ville dessinée

    C’est le cœur urbain de la ville. Sur plus de huit hectares, il accueille les principales rues commerçantes. Son paysage procède de la mise en forme d’une composition pensée et ordonnancée le long du rivage à la fin du XIXe siècle.

    A partir de deux grands axes principaux orthogonaux – orienté nord-sud, le boulevard Paoli, long de plus de 500 mètres, qui met en scène en partie haute l’édifice du Palais de Justice ; et l’avenue Maréchal-Sébastiani qui relie d’ouest en est la gare au port de commerce –, les voies disposées en damier délimitent d’imposants îlots bâtis. Les immeubles massifs et élégants s’organisent sur rue et sur cour intérieure commune. Des façades ordonnées aux ouvertures rythmées, agrémentées de persiennes et de sobres moulures, des rives de toits soulignées par des corniches rigoureusement alignées, quelques balcons aux garde-corps ciselés, sont les principales composantes de ce paysage de larges « boulevards urbains» bordés de trottoirs souvent ombragés. Sur l’axe ouest-est, lorsque la topographie a été contraignante, des ensembles d’emmarchements plus ou moins étirés créent des liaisons avec les quartiers du marché et du vieux port. Ces mêmes éléments se retrouvent à l’ouest le long du boulevard Giraud, mais ici, il a fallu s’adapter à la déclivité du terrain.

    En façade maritime, la longue place Saint-Nicolas (300 mètres de long sur 90 mètres de large) permet l’articulation avec la ville ancienne. Cette vaste esplanade décorée de palmiers, lieu de vie central qu’animent les terrasses de cafés, ouvre la ville sur le port et la mer.

  • 3 - La ville moderne

    3.01 - L’habitat individuel groupé de ville

    Ces quartiers peu étendus se sont constitués à partir de « noyaux » de lotissements anciens, mis en place au début et au milieu du XXe siècle, en retrait du centre-ville. Ils se présentent aujourd’hui comme de petits « oasis » dans le tissu dense de la ville moderne.

    3.01A – Quartiers Annonciade et Giambelli

    Dans les années 1930 à 1950, des ensembles de maisons individuelles ont été bâtis au nord-ouest de la ville dessinée, légèrement en hauteur. Aujourd’hui liés par une urbanisation plus récente dont les quelques immeubles portent trace, ils ont néanmoins préservé leur singularité. Des petites maisons sur deux niveaux, agrémentées de jardins plantés, pour les premières implantations, s’alignent le long de voies étroites qui épousent le relief. Des villas plus récentes, datant des années 1950 et 1960, s’isolent dans leurs parcelles de jardin. Ces quartiers ont gardé leur caractère d’habitat individuel dans la ville verticale qui s’est développée autour d’eux.

    3.01B – Quartier Biaggini

    En partie sud de la vallée du Fango, sur un premier vallonnement regardant vers la mer à 70 mètres d’altitude, des groupes de maisons construites avant 1950 se sont nichés en limite de la ville XIXe. Des parcellaires étroites, des rues resserrées, des murs de clôture très présents qui rappellent le mur du couvent Saint-François caractérisent ce paysage « refermé », d’échelle réduite. À l’est, les jardins des maisons jouxtent les terrasses verdoyantes des immeubles bourgeois de la rue César-Campinchi.

    3.01C Quartier de Paratojo

    Peu perceptible dans l’ensemble bâti, ce quartier des années 1950 est aujourd’hui traversé par les voies routières ouvertes dans le cadre de l’aménagement du secteur du Fango. En partie sud, quelques maisons de la fin du siècle dernier avec leurs petits jardins s’accrochent au terrain en forte déclivité. L’étroite route d’accès fait des lacets entre murs de clôture et espaces plantés. Au nord, l’habitat individuel est groupé le long d’une petite voie de desserte centrale qui surplombe le jardin du Fango. La topographie permet d’échapper en grande partie à l’environnement immédiat d’immeubles de grande hauteur, ce qui donne à ce paysage urbain son identité.

    3.01 D – Quartier Nucellu

    À partir d’un petit lotissement postérieur à 1950, un ensemble de maisons individuelles s’est développé sur un promontoire entre 80 et 100 mètres d’altitude, autour de deux routes étroites. Les murs de clôture le long des voies laissent apercevoir les jardins d’agrément. Une atmosphère de campagne se dégage de ces lieux. On oublie la ville toute proche, perceptible seulement à partir des points hauts d’où l’on découvre les toits de lauzes grises du vieux Bastia dévalant jusqu’à la mer.

    3.02 - La ville étendue recomposée

    Depuis les quartiers anciens, la ville s’est étendue au XXe vers les hauteurs, dans le prolongement des voies existantes ; en direction du sud, le long du rivage ; et vers le sud-est, en remontant la vallée du Fango.

    3.02 A – Avenue Émile-Sari, quartier de Toga

    Cette première extension a permis de doubler la superficie de la ville. Dans la partie sud (années 1930 et 1940), l’ordonnancement des immeubles prolonge celui des quartiers XIXe. La typologie du bâti renvoie cependant à un nouveau mode de vie : les façades sont animées par de nombreux balcons, des ouvertures de plus grandes dimensions. En allant vers le nord, les voies s’élargissent, supportent des aménagements routiers et franchissent les premiers reliefs. C’est là que s’organisent les accès aux ports. Plus loin, de hauts immeubles construits au cours des quarante dernières années, s’étagent sur les pentes parallèlement au rivage.

    Depuis la ville dessinée, si dans un premier temps les façades s’ordonnent le tissu urbain se distend ensuite et s’étage ; mais la verticalité reste présente.

    3.02 B Les Capucins, Lupino, Paese Novu, Montesoro

    De nouveaux quartiers ont surgi dans les années 1950 en bord de mer, au sud de la vieille ville. Cette urbanisation moderne s’étale vers la plaine de la Marana, entre la plage de l’Arinella, la route nationale 193 et le piémont (Paese Novu est à 120 mètres d’altitude). Avec la généralisation de l’usage de l’automobile, les emprises routières se sont multipliées. Notamment celle de la RN193, qui longe la mer à l’entrée dans la ville, et des axes qui desservent transversalement les quartiers jusqu’aux versants. À l’est, la partie basse de l’ensemble urbain est largement dévolue aux infrastructures (rond-point, tunnel, voie ferrée…).

    Notamment celle de la RN193, qui longe la mer à l’entrée dans la ville, et des axes qui desservent transversalement les quartiers jusqu’aux versants. À l’est, la partie basse de l’ensemble urbain est largement dévolue aux infrastructures (rond-point, tunnel, voie ferrée…).

    Dans cette ville du XXe siècle prédominent de grands ensembles de béton dont la façade principale regarde la mer. Ces îlots urbains, distants les uns des autres, ménagent quelques espaces de verdure entre les voies de desserte, mais la verticalité y est omniprésente.

    La verticalité des immeubles contraste sur la mer.

    3.02C – La vallée du Fango

    Toujours à la frontière de la ville XIXe, un nouveau quartier s’est développé dans les années 1980, en remontant la vallée du Fango à partir de la gare ferroviaire. Dans ce décor encaissé de fond de vallée ouverte, l’urbanisation s’organise autour de la voie routière majeure qui permet de rejoindre le port. Les nombreux équipements (préfecture, lycée, services administratifs) et les hauts immeubles d’habitation forment un premier plan minéral aux versants de Bastia. La large avenue, avec son terre-plein central rythmé de palmiers, et les édifices d’implantation et d’architecture variées, identifient ce paysage. Un parc urbain a été aménagé en limite du quartier de l’Annonciade. Depuis la partie haute de l’avenue, le port de commerce et la mer apparaissent entre les façades de la ville XIXe.

    3.03 - La ville étalée

    Les quartiers les plus récents, colonisant l’espace disponible sur les pentes de la Serra ou les premiers reliefs dominant la plaine de la Marana, témoignent d’une nouvelle forme d’urbanisation extensive, caractérisée par un habitat individuel qui cherche à renouer le lien avec la nature.

    3.03 A – Piémont de Toga et du Monte Pinzuttu

    Au nord de la ville dense, au pied des versants de Bastia, en amont des ensembles d’immeubles des années 1970 construits face à la mer, se développe une urbanisation récente constituée de maisons individuelles. De petites routes parfois très étroites, reprenant le tracé d’anciens chemins agricoles, sinuent dans une végétation qui forme un écrin naturel.

    3.03 B Piémont de Santa-Lucia

    Les maisons individuelles qui s’étagent entre 50 et 250 mètres d’altitude, autour des hameaux de Casevecchie, Guaïtella et Alzeto (commune de Ville de Pietrabugno), remontent au dernier demi-siècle. Sur le versant sud de la vallée du Fango, dont elles prolongent l’urbanisation, elles forment un ensemble dominé par le clocher de Santa-Lucia qui plante sa flèche sur le promontoire.

    3.03 C – San Gaetano

    Sa position dominante, à 230 mètres, singularise ce quartier dans l’ensemble bâti de la ville de Bastia. Depuis le CD 54 qui mène au hameau de Cardo, des routes en lacets desservent les immeubles et les maisons individuelles édifiés sur les pentes depuis les années 1970. Une couronne végétale circonscrit et isole l’ensemble construit, le rendant ainsi bien identifiable. Depuis ce belvédère urbanisé, la vue s’ouvre sur les plages de la Marana, le plan d’eau de l’étang de Biguglia et la mer.

    3.03 D Boulevard Danesi, Saint-Antoine, Filippina

    Depuis les hauteurs du Fango, le CD81 conduit jusqu’à une cuvette, encore en grande partie naturelle, dominée par le couvent Saint-Antoine (XVIe s.). En fond de cuvette, des immeubles des années 50 poursuivent l’urbanisation du centre-ville, en arrière du palais de justice. Au sud, une ligne de relief ferme le paysage. Des maisons individuelles s’y sont installées. C’est de ce point haut que l’on emprunte la « descente des Filippina », un chemin de campagne qui mène, en voiture puis à pied, jusqu’à la Place d’Armes et la Citadelle, entre les murs de clôture des jardins.

    3.04 - Le secteur d’activité de la RN 193

    Un axe routier à grande circulation – la route nationale 193 – jalonné de carrefours giratoire, des bâtiments commerciaux ou industriels se succédant de part et d’autre de la voie sans continuité ni cohérence architecturales, constituent un paysage urbain très minéralisé qui contraste dans l’ensemble encore largement naturel des versants de Bastia. Un paysage dévolu à la voiture, fortement marqué par les enseignes publicitaires, les panneaux indicatifs et les lampadaires filiformes « plantés » en bord de route…

  • 4 - Les ports

    Le vieux port est une composante du paysage de la ville ancienne : il en constitue la façade sur mer. On ne le retrouvera donc pas dans ce paragraphe. Nous considèrerons ici les ports de commerce et de Toga.

     

    4.01 Le port de commerce

    Aménagé à la fin du XXe siècle, agrandi depuis lors, le plan d’eau est limité par une longue jetée qui, dans le paysage bastiais, représente l’élément urbain le plus avancé sur la mer. C’est un port dans la ville, lié intimement aux lignes de rivage que soulignent le quai des Martyrs et la jetée sud du vieux port. À l’horizontalité du plan d’eau qu’accompagnent les quais de débarquement périphériques, répond le vide de la place Saint-Nicolas et la géométrie de ses alignements de platanes. Les grands navires, bâtiments flottants éphémères, rivalisent avec les hautes maisons bordant la place. Le trafic incessant de ces bateaux qui semblent pénétrer au cœur du vieux Bastia donne à la ville son tempo.

    4.02 Le port de Toga

    Le port de plaisance créé dans les années 1980, compose un paysage circonscrit et fermé. Ses hautes jetées masquent la vue sur la mer au niveau des terrasses des cafés. Le plan d’eau se découvre depuis la route du Cap Corse qui le domine. Aujourd’hui les constructions se poursuivent autour de l’ensemble portuaire, devant l’arrière-plan des façades monolithiques des immeubles du quartier de Toga.

    Les jetées de pierre, par devant le ciel, ramènent la vue à l’enceinte du port.

  • 5 - Les rives et rivages urbains

    5.01 - La promenade du « front de mer ».

    Ce véritable boulevard urbain de bord de mer a trouvé place dans le paysage bastiais lors de la mise en œuvre du tunnel creusé sous le vieux port et le « verrou » de la forteresse, facilitant l’accès au centre-ville. Entre les remparts de la citadelle et la plage de l’Arinella, le fin ruban de bitume est bordé par un alignement de palmiers qui jouent avec les lignes de brise-vagues et la mer. Au débouché du tunnel, une petite plage s’ouvre au droit de l’anse de Figajola, annonçant les rivages sableux de la Marana.

    Une ligne de rivage soulignée, un ruban d’asphalte s’y dessine.

    5.02 - La plage de l’Arinella

    Au sud de la ville, là où la promenade de bord de mer s’achève et le rivage prend de l’épaisseur, une large plage de sable s’étend en contre-bas de la route nationale. C’est une plage dans la ville, dont l’arrière est aménagé et reçoit des équipements de loisirs ; un camping y a trouvé place. Ce paysage particulier s’inscrit à la fois dans le décor urbain quartier de Montesoro qui le surplombe, et dans l’environnement naturel des rivages sableux de la Marana dont il marque l’entrée.

    Au loin, la vieille ville referme la ligne de sable.

5.02

B - Versants de Bastia

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Unités paysagères

Par sa situation géographique et sa morphologie, la partie du nord de l’unité appartient encore au versant oriental du Cap Corse. Le paysage est dominé par les hauteurs de la montagne de Pignu, premiers sommets de la Serra, l’arête dorsale du Cap. La barrière rocheuse plonge vers l’agglomération bastiaise, blottie à ses pieds entre pente et rivage. Vue de la mer, c’est la vague urbaine qui semble chercher à gravir la montagne.

Depuis le col de Teghime, point haut de l’unité (536 m), le regard embrasse les deux horizons de la Corse. Les reliefs du Nebbiu et de l’Agriate, vers l’ouest, dessinent des plans successifs sur l’arrière-fond de la Méditerranée. Côté mer Tyrrhénienne, un panorama plus saisissant encore s’ouvre sur la ville, ses périphéries, et au sud, la plaine alluviale de la Marana. L’étang de Biguglia, miroir aux reflets métalliques, se détache sur le fond sombre et uni de la plaine. Le rivage, l’étang, le cordon littoral et ses graus, la montagne et ses vallées, les rivières qui font le lien entre tous ces éléments : le paysage se donne à lire comme dans une image d’un livre de géographie. Au loin, par temps clair, la vue porte jusqu’aux îles de l’archipel toscan (Capraia, Elbe, Pianosa, Monte Cristo), et parfois on aperçoit la ligne vaporeuse de la côte italienne.

5.02

C - Versants de la Marana

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Unités paysagères

Au sud de Bastia, la plaine s’appuie sur la crête majeure qui passe par le col de Teghime, culmine à la cime de Zuccarello (955 m) et s’interrompt au niveau du défilé du Lancone, entaille ouverte dans la montagne par les eaux du Bevinco, avant qu’elles ne se jettent dans l’étang de Biguglia. Les versants, de loin, paraissent assez plans ; ils sont en réalité creusés d’étroits talwegs presque parallèles, correspondant à autant de cours d’eau qui dévalent vers la lagune. En contrebas, une bande de territoire urbanisée tend à s’élargir à partir de la route nationale (RN193). C’est en effet le long de cet axe que l’urbanisation bastiaise, bloquée au nord par les escarpements du Cap Corse, se diffuse dans l’espace ouvert de la plaine. Les villages historiques de Furiani et Biguglia, comme toujours en Corse, sont juchés sur les hauteurs. Un réseau de voies secondaires en « peigne » les dessert depuis la nationale. Ce secteur est l’un des rares à ne pas posséder de route découverte en balcon. A hauteur de la ligne des  villages, les traces de jardins, de terrasses, d’anciennes cultures restent bien visibles. Tout signe d’activité agricole disparaît en amont : cernant de rares îlots boisés, le maquis bas, dégradé des incendies répétés, donne à ces pentes un air d’abandon qui contraste fortement avec l’animation de la plaine, comme si cette dernière captait toute l’énergie disponible pour le développement.

Au sud de Biguglia, la percée du Lancone pénètre dans la plaine, tel un coin dans une bille de bois, avant de buter sur la route et la voie ferrée : l’axe de l’urbanisation, perpendiculaire à la coupure naturelle, semble ainsi bloquer sa progression, tout en brouillant sa perception.

L’unité se poursuit depuis le défilé du Lancone au nord, jusqu’à la rive gauche de la vallée du Golo, qui creuse au sud une autre entaille profonde dans la montagne. Sur le flanc ouest, la ligne de crêtes borne le paysage. Elle relie le Monte Torricella (835 m) à la cime des Taffoni (1117 m), avant de rejoindre le col de Campu, au-dessus de Lucciana, puis de redescendre vers la brèche du Golo. Depuis les pentes, l’œil s’échappe sur l’étendue de la plaine littorale de la Marana et le grand espace maritime.

On retrouve ici une structure identique à celle des versants de Bastia, avec le même « profil » paysager et les mêmes composantes : des contreforts montagneux tournés vers la mer, aux pentes entaillés par les sillons de petits vallons parallèles ; des villages d’implantation historique, Lucciana et Borgo, bien regroupés en position dominante ; et entre la route nationale et les reliefs, un étroit piémont en voie d’urbanisation. Quelques lotissements se sont perchés sur les premières collines (Sant’Ornellu), parfois tout près des villages (Borgo) ou des hameaux anciens (Ortale).

Les vallons perdent leur lisibilité en aval, lorsqu’ils atteignent la plaine, du fait de la coupure de la route et de ce grignotage urbain dû à la proximité de Bastia. Les motifs qui leur sont liés – le dessin des cours d’eau, la texture des ripisylves… – sont ici brouillés ou masqués. Plus haut, les versants se couvrent d’un maquis plus ou moins dense, ponctué de formations boisées préservées par les incendies. Le chêne liège qui domine aux faibles altitudes, laisse place au chêne vert sur les pentes rocailleuses, ou au châtaignier dans les creux des vallons. Sur la ligne de crête se découpent les silhouettes solitaires de vieux arbres épargnés par les feux.

5.02

D - Plaine de la Marana

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Unités paysagères

La plaine de la Marana – en corse, « la terre près de la mer » – s’étend entre les plages et le pied des versants, depuis les quartiers sud de Bastia jusqu’à la rive gauche du Golo, dont le lit trace la limite de la Casinca. Au cours des âges, le fleuve et les autres cours d’eau descendant des montagnes ont arraché à celles-ci des matériaux charriés vers la mer : la lente accumulation des alluvions a formé cette plaine qui se poursuit dans la Casinca. Sur le fond sombre des versants, les villages perchés de Furiani, Biguglia, Borgo et Lucciana créent des événements facilement identifiables. Ils fournissent autant de points de repère dans ce paysage sans relief, dont les véritables dimensions s’appréhendent depuis les hauteurs.

L’unité comporte deux sous-ensembles :

Le « couloir » de la RN 193

La topographie de la plaine a favorisé le développement de l’agglomération bastiaise le long de la route nationale et de la voie ferrée qui filent droit vers le sud. Sur une quinzaine de kilomètres, jusqu’à l’aéroport, c’est de chaque côté du couloir de communication une litanie de bâtiments commerciaux, de zones d’activités artisanales, d’immeubles résidentiels et de panneaux publicitaires, sans cohérence urbanistique ni architecturale. Derrière cette façade sans épaisseur urbaine, quelques grands équipements (stade, hippodrome, maison d’arrêt, aéroport…) ont trouvé place entre la route et l’étang ou les plages Côté montagne, l’habitat diffus récent cherche la vue sur la mer. Le couloir artificiel de la nationale ignore les paysages naturels et ménage peu d’espaces de respiration. Les rares « coupures vertes » existantes (fenêtre sur l’étang à Fornagina, brèche du Lancone et débouché du Bevinco, alentours de la prison de Borgo, rives du Golo jusqu’à l’embouchure) n’en prennent que plus de valeur.

 

La plaine agricole

L’assainissement et l’irrigation ont permis de longue date la mise en valeur agricole d’une partie de la plaine de la Marana, conquise sur les marécages. Ce travail pluriséculaire a donné une riche marqueterie de vergers, de cultures maraîchères, de vignes et de prairies, qu’organise la géométrie des brise-vents, des chemins et des canaux. La densité des haies végétales et des bosquets confère à ce territoire une allure de bocage. L’étendue de la plaine n’est réellement perceptible qu’au sud de l’aéroport : le parcellaire y laisse place à un paysage ouvert mais comme abandonné, où l’érosion met à jour les galets alluvionnaires ; c’est là que se dresse, solitaire, l’ancienne cathédrale de la Canonica. Le visage de la plaine cultivée change sous la pression urbaine, d’autant plus que la ville est proche. L’impact visuel de cette urbanisation reste cependant limité lorsqu’elle s’intègre dans le tissu parcellaire existant.

5.02

E - Etang de Biguglia

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Unités paysagères

Né selon la légende lorsque qu’une tempête a submergé la plaine, l’étang de Biguglia (ou de Chiurlinu) est le plus vaste de Corse avec ses 1600 hectares, soit plus du tiers du total des surfaces humides de l’île. La lagune communique avec la mer par un étroit chenal long de 1,5 km. Face aux menaces qui pesaient sur lui, ce site d’intérêt majeur du point de la biodiversité a été classé réserve naturelle en 1994. Le plan d’eau, à deux pas de Bastia et de la RN 193, mais aussi de la verticalité minérale de la  montagne, offre un espace exceptionnel de « planitude reposante ». Les lieux invitent à la pause et au silence. La lumière et l’eau, la végétation, le vent, les odeurs du marais, les appels des animaux composent un kaléidoscope de couleurs, d’ambiances, d’impressions qui se mêlent et changent à chaque instant. Tôt le matin ou à la tombée du jour, l’étang joue avec nos imaginaires. Une ceinture végétale souligne les berges en même temps qu’elle les protège : elle forme comme un écrin autour de l’étang, le long duquel des sentiers aménagent de discrets observatoires. L’urbanisation en fond de décor renforce le sentiment de jouir d’un paysage rare, à préserver absolument.

 

Le lido de la Marana

L’étroit cordon de sable qui sépare sur 11 km la lagune du rivage battu par les vagues, est aujourd’hui en grande partie urbanisé. L’absence à ce jour de hautes constructions et la présence d’une végétation arborée atténuent cependant le sentiment d’artificialisation. Entre les lotissements et les villages de vacances, l’intervention du Conservatoire du littoral a par ailleurs permis de préserver quelques fenêtres naturelles. Depuis Furiani, la route qui dessert le lido et ses plages déroule ainsi des « tranches de paysages » perpendiculaires à la ligne de côte, dont les motifs alternent comme ceux d’une frise. Entre les pinèdes et les résidences balnéaires, des séquences de dunes ou de landes ouvrent quelques vues sur la mer. C’est seulement dans ces fenêtres sauvegardées qu’apparaît encore, cette fois dans une succession parallèle au rivage, l’enchaînement des milieux naturels entre l’étang et la mer : la vasière, la roselière, la frange arborée, puis au-delà de la route, une bande de maquis ou de bois, la dune et la plage.

Motifs & Enjeux

Étang Lido

Chemin d’observation le long de l’étang : poste d’observation privilégié de l’ensemble complet, dualité plaine/montagne.

Plaine agricole

Les haies de cyprès et casuarina, de la plaine, sont des éléments structurants du tissu parcellaire de l’unité qui ont tendance à disparaître

Canaux/cours d’eau : maintenir la lecture de ces éléments

Routes

Marquer les passages des cours d’eau : « ponts », ripisylves à recréer, caractère de gorges naturelles

Étang Lido

Chemin d’observation le long de l’étang : poste d’observation privilégié de l’ensemble complet, dualité plaine/montagne.

Une maladie des pins met en suspend l’avenir de la pinède

Le soin apporté à l’aménagement entre espaces urbanisés et espaces naturels par les politiques privées ou publiques montrent une tendance à un changement d’image, … à poursuivre

Chemin littoral intégral

Plaine agricole

Les gros équipements ou infrastructures ont peu d’impact sur le passage à condition de s’intégrer dans le maillage du tissu parcellaire existant ou à reconquérir

Routes

Bâtiments qui mordent sur la coupure du Lancone/Bevinco

Routes

Le couloir de la « consommation », bordé de panneaux publicitaires ; la voie rapide de la RN193 au niveau de la gare de Casatorra et de l’hippodrome, bordée de panneaux publicitaires ferme la vue

Plaine agricole

Le tissu parcellaire est à recréer aux abords des aménagements structurants : voies, etc