L’ensemble correspond au bassin versant de l’Ostriconi, fleuve qui prend sa source sur les pentes du Monte Reghia di Pozzo, dans le massif de Tenda, et se jette dans la mer dans la baie de Peraiola, à la limite occidentale du massif de l’Agriate. I Paesi d’Ostriconi est constitué de trois vallées convergentes. La plus longue, la vallée de l’Ostriconi proprement dite, orientée sud-est – nord-ouest, ouvre entre le Nebbiu et le Giussani un couloir de communication – U Canale – qui relie le centre de l’île à la côte occidentale et à la Balagne. Sur le plan géologique, la micro région forme également une frontière naturelle entre le rude socle granitique des montagnes du Tenda et les tendres reliefs des couches métamorphisées de la « nappe de Balagne » (1-2).
L’organisation du bassin versant fait que l’ensemble présente deux flancs dissymétriques. A l’est, les pentes raides et rocailleuses du Tenda créent une délimitation franche, une barrière à la fois spatiale et visuelle. C’est sur ces versants que s’accrochent les villages de Pietralba, Lama et Urtaca. Du côté opposé la perception des limites de l’ensemble est bien moins nette en raison de la présence des vallées secondaires de Palasca et de Novella, aux paysages plus composites ; sur les vallons et collines aux formes plus douces s’étagent prairies et cultures, pâturages, garrigues à ciste puis maquis à chêne vert (3-Depuis les versants du Tenda, vue sur la vallée principale de l’Ostriconi et les vallons secondaires du versant occidental. Le fleuve va se jeter dans la mer au pied de la Punta Liatoghju, montagne de granite blanc dont l’on aperçoit en arrière-plan la silhouette détachée du massif de l’Agriate).
Dans l’axe du fleuve, le cours de l’Ostriconi est doublé par la RN1197, la « Balanina », ouverte en fond de vallée pour remplacer l’ancienne route qui serpente dans le vallon de Lagani (rattaché à l’ensemble mitoyen de Caccia). D’autres voies secondaires desservent les villages. U Canale porte bien son nom : depuis le col de Sainte-Marie jusqu’à la crête de Piana a U Rossu, l’unité prend la forme d’un immense couloir en pente qui canalise le visiteur et l’emmène vers la mer, dont on pressent et devine la présence bien avant de la voir.L’Ostriconi change de visage juste avant de rejoindre la Méditerranée : le cours d’eau devient alors sinueux et derrière la grande plage de sable de la baie de Peraïola, le fleuve et l’un de ses bras morts (étang de Foce) ont créé une lagune d’une qualité écologique et paysagère exceptionnelle. Dominée par les crêtes arides du massif de l’Agriate, cette zone humide s’étend dans la plaine où une ripisylve dense masque les méandres de la rivière. Marécages, roselières, cariçaies, bosquets d’eucalyptus et de tamaris, parcelles cultivées composent un riche écosystème et un décor très original qui tient à la fois du bocage et du bayou. L’embouchure du fleuve, site classé, appartient au patrimoine du Conservatoire du littoral ; elle est inscrite au titre de la loi de 1930 et en tant que site Natura 2000 (4- Un « grand paysage » : l’embouchure de l’Ostriconi et sa zone humide).
Le « pays d’Ostriconi », jadis l’une des principales régions oléicoles de l’île, s’est dépeuplé au siècle passé, avec le lent déclin de l’oliveraie à laquelle le grand incendie de 1971 a failli porter le coup de grâce. Les villages ont perdu beaucoup d’habitants, certains (Paghina, Cruschini, E Spelunche) ont même été abandonnés ; le maquis a repris ses droits sur les terres délaissées (5-Le manteau vert du maquis couvre la majeure partie des reliefs jusqu’aux premières pentes du massif du Tenda).
Depuis la fin du XXe siècle on assiste toutefois à une certaine renaissance de l’oléiculture, et avec elle, des paysages harmonieux qui lui sont associés. En même temps les paysages agricoles se diversifient, notamment sur les deux rives de la « Balanina » où les plantations d’oliviers alternent avec les vergers, les prairies et – production plus nouvelle – les cultures d’immortelles dont l’on extrait des huiles essentielles. Le développement du tourisme contribue également à ce regain : un tourisme tourné vers la nature, avec l’aménagement de nombreux gîtes ruraux, mais aussi vers la culture, comme en témoigne le Festival européen du cinéma et du monde rural qui se tient chaque année dans le superbe village de Lama (6-7-8).