Atlas des paysages

de la Corse

3.01 - Ostriconi

Les communes de l'ensemble paysager

Novella, Lama, Urtaca, Palasca, Pietralba

L’ensemble correspond au bassin versant de l’Ostriconi, fleuve qui prend sa source sur les pentes du Monte Reghia di Pozzo, dans le massif de Tenda, et se jette dans la mer dans la baie de Peraiola, à la limite occidentale du massif de l’Agriate. I Paesi d’Ostriconi est constitué de trois vallées convergentes. La plus longue, la vallée de l’Ostriconi proprement dite, orientée sud-est – nord-ouest, ouvre entre le Nebbiu et le Giussani un couloir de communication – U Canale – qui relie le centre de l’île à la côte occidentale et à la Balagne. Sur le plan géologique, la micro région forme également une frontière naturelle entre le rude socle granitique des montagnes du Tenda et les tendres reliefs des couches métamorphisées de la « nappe de Balagne » (1-2).

L’organisation du bassin versant fait que l’ensemble présente deux flancs dissymétriques. A l’est, les pentes raides et rocailleuses du Tenda créent une délimitation franche, une barrière à la fois spatiale et visuelle. C’est sur ces versants que s’accrochent les villages de Pietralba, Lama et Urtaca. Du côté opposé la perception des limites de l’ensemble est bien moins nette en raison de la présence des vallées secondaires de Palasca et de Novella, aux paysages plus composites ; sur les vallons et collines aux formes plus douces s’étagent prairies et cultures, pâturages, garrigues à ciste puis maquis à chêne vert (3-Depuis les versants du Tenda, vue sur la vallée principale de l’Ostriconi et les vallons secondaires du versant occidental. Le fleuve va se jeter dans la mer au pied de la Punta Liatoghju, montagne de granite blanc dont l’on aperçoit en arrière-plan la silhouette détachée du massif de l’Agriate).

Dans l’axe du fleuve, le cours de l’Ostriconi est doublé par la RN1197, la « Balanina », ouverte en fond de vallée pour remplacer l’ancienne route qui serpente dans le vallon de Lagani (rattaché à l’ensemble mitoyen de Caccia). D’autres voies secondaires desservent les villages. U Canale porte bien son nom : depuis le col de Sainte-Marie jusqu’à la crête de Piana a U Rossu, l’unité prend la forme d’un immense couloir en pente qui canalise le visiteur et l’emmène vers la mer, dont on pressent et devine la présence bien avant de la voir.L’Ostriconi change de visage juste avant de rejoindre la Méditerranée : le cours d’eau devient alors sinueux et derrière la grande plage de sable de la baie de Peraïola, le fleuve et l’un de ses bras morts (étang de Foce) ont créé une lagune d’une qualité écologique et paysagère exceptionnelle. Dominée par les crêtes arides du massif de l’Agriate, cette zone humide s’étend dans la plaine où une ripisylve dense masque les méandres de la rivière. Marécages, roselières, cariçaies, bosquets d’eucalyptus et de tamaris, parcelles cultivées composent un riche écosystème et un décor très original qui tient à la fois du bocage et du bayou. L’embouchure du fleuve, site classé, appartient au patrimoine du Conservatoire du littoral ; elle est inscrite au titre de la loi de 1930 et en tant que site Natura 2000 (4- Un « grand paysage » : l’embouchure de l’Ostriconi et sa zone humide).

Le « pays d’Ostriconi », jadis l’une des principales régions oléicoles de l’île, s’est dépeuplé au siècle passé, avec le lent déclin de l’oliveraie à laquelle le grand incendie de 1971 a failli porter le coup de grâce. Les villages ont perdu beaucoup d’habitants, certains (Paghina, Cruschini, E Spelunche) ont même été abandonnés ; le maquis a repris ses droits sur les terres délaissées (5-Le manteau vert du maquis couvre la majeure partie des reliefs jusqu’aux premières pentes du massif du Tenda).

Depuis la fin du XXe siècle on assiste toutefois à une certaine renaissance de l’oléiculture, et avec elle, des paysages harmonieux qui lui sont associés. En même temps les paysages agricoles se diversifient, notamment sur les deux rives de la « Balanina » où les plantations d’oliviers alternent avec les vergers, les prairies et – production plus nouvelle – les cultures d’immortelles dont l’on extrait des huiles essentielles. Le développement du tourisme contribue également à ce regain : un tourisme tourné vers la nature, avec l’aménagement de nombreux gîtes ruraux, mais aussi vers la culture, comme en témoigne le Festival européen du cinéma et du monde rural qui se tient chaque année dans le superbe village de Lama (6-7-8).

Références bibliographiques

Charte paysagère du Pays de Balagne, agence Paysages, 2008.

Jean-Michel Casta, illustrations de Fabien Seignobos, Les Agriates – Haute-Corse, 2001.

Denis Clavreul, La Corse, Carnets du littoral, Gallimard – Conservatoire du littoral, 1995

Bloc diagramme 3D

Sources - IGN / Ortho HR Janvier 2021 / RGE Alti 2020

3.01

A - U Canale

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Unités paysagères

D’un point de vue géographique, le grand « toboggan » de U Canale est l’un des prolongements du Sillon, la dépression qui fait communiquer, via l’intérieur de l’île, le littoral occidental et la côte orientale de la Corse. L’ampleur et la linéarité du couloir empêchent de se sentir enfermé : même en fond de vallée, les perspectives axiales et latérales restent ouvertes, donnant un sentiment de « grand espace ».

L’ouverture de la RN1197 dans l’axe de la vallée a modifié profondément la perception de cette unité autrefois enclavée. On peut même dire que l’aménagement routier, au tracé bien intégré dans son environnement, a révélé un paysage en pleine mutation. Sans doute les nombreux vestiges d’anciennes activités agricoles rappellent-ils que ces terres faisaient autrefois l’objet d’une exploitation bien plus intensive qu’aujourd’hui. Mais depuis la mise en service de la route, l’agriculture reprend de la vigueur le long de la « Balanina ». De part et d’autre de celle-ci les garrigues reculent, des vergers de fruitiers sont nettoyés, des oliveraies replantées, prairies et champs d’immortelles remettent en valeur terres agricoles, et ce paysage de nouveau travaillé, humanisé, reconquiert progressivement le pied des versants dénudés par les incendies et le surpâturage.

A partir de Pietralba, situé au bord de la « Balanina », une petite route en balcon dessert les autres villages – Lama, Urtaca –  perchés sur le flanc droit de la vallée. D’en bas les habitations semblent s’être regroupées dans les endroits les plus inaccessibles, au milieu d’un désert aride et rocailleux. Il faut grimper jusqu’à elles pour comprendre leur implantation : en arrière-plan, dans des vallons bien exposés qu’arrosent les ruisseaux venus de la montagne, toute une armature de terrasses accueille jardins et cultures vivrières. De là partent de nombreux chemins menant vers les hauteurs du Tenda (HAUT :Pietralba ; BAS : Le village d’Urtaca, placé en hauteur et en retrait sur les versants du Tenda).

Depuis les pentes du Monte Astu, surplombant le village médiéval de Lama dont les maisons se serrent sur une série d’éperons et de mamelons, le panorama embrasse toute la vallée. Sur la crête opposée de Piana a u Rossu, le pare-feu semble tracer une frontière avec les vallées adjacentes de Palasca et de Novella, laissées à l’écart de l’espace de développement et de communication du Sillon.

 

3.01

B - Vallée de l’Ostriconi

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Unités paysagères

Passée la crête de Piana a u Rossu, le couloir de l’Ostriconi s’élargit tout en basculant vers la Méditerranée. Fermes et prairies investissent à nouveau le fond de vallée sur les deux rives du fleuve. L’ambiance rurale prédomine encore au pied des versants où les oliviers et les amandiers surlignent la mosaïque de vignes, de cultures céréalières et de prairies. L’étage supérieur des collines, désinvesti, est quant à lui couvert d’un maquis bas témoignant du passage répété des incendies (L’oliveraie au premier plan est encore exploitée, contrairement à celle qui émerge du maquis dégradé occupant les versants).

 

Puis le paysage change avec la végétation : entre les croupes arides du nord de la Balagne et celles de l’Agriate, le fleuve finit sa course en fertilisant une grande plaine alluviale verdoyante.

Une belle plage de sable dont les deux extrémités s’arriment à la côte rocheuse borde la baie de Peraiola. Le cordon sablonneux porte les plus grandes dunes de l’île, dues au travail conjugué des vagues et des vents d’ouest. Sur les premières pentes de l’Agriate d’autres dunes dites « fossiles », car beaucoup plus anciennes et depuis longtemps inactives, arborent une couleur rouille qui tranche avec le blanc des formations récentes. A l’arrière du cordon littoral et de la lagune s’étend l’ample plaine bocagère. Outre ses qualités paysagères et écologiques, justifiant les protections dont il fait l’objet, le site de l’embouchure de l’Ostriconi « frappe l’observateur par son aspect très ordonnancé, presque jardiné, et par le contraste de formes, de couleurs et d’échelle avec les reliefs rocailleux et âpres qui forment la toile de fond » (Haute-Corse, Diagnostic paysager, 2003)

 

3.01

C&D - Vallée de Palasca & Vallée de Novella

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Unités paysagères

Les deux vallées en balcon, décalées par rapport à l’axe de l’Ostriconi, et leurs villages de caractère sont desservis par des petites routes sinueuses qui semblent se frayer de plus en plus difficilement un passage à travers le maquis. Celle qui mène au village de Novella est enfouie en fond de vallée, tandis que la route conduisant à Palasca chemine sur les crêtes, d’où elle dégage des vues sur la baie de Peraiola et l’embouchure de l’Ostriconi. La voie ferrée Bastia-Calvi, passe à flanc de versants, offrant un autre mode de découverte (HAUT : Remarquable tant pour son implantation que pour la densité et l’homogénéité de son architecture, le village de Palasca apporte un peu de vie à une vallée qui paraîtrait, sans lui, bien délaissée ; BAS : Quelques prairies et oliveraies se maintiennent aux abords du village de Novella).

Palasca et Novella restent des voies de passage pour les bergers et leurs troupeaux qui transhument entre mer et montagne. Mais l’agriculture a presque totalement disparu de ces vallées retirées, repliées sur elles-mêmes, à l’écart des grands axes de circulation. L’ancienne trame de murets, de terrasses et de chemins se dérobe désormais au regard sous la couverture du maquis dont la monotonie accentue le sentiment d’abandon dégagé par ces paysages. L’uniformité du couvert végétal des versants fait également ressortir la géométrie (trop) régulière des rares espaces ouverts créés par les aménagements (routes, pare-feux sur les lignes de crêtes) (HAUT : La vallée de Palasca vue depuis le Col de San Colombano en limite de l’ensemble ; BAS : En arrière-plan, émergeant du massif voisin de l’Agriate, la Punta Liatoghju vient animer le paysage de la vallée).

 

Motifs & Enjeux

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