Atlas des paysages

de la Corse

3.18 - Alta Rocca

Les communes de l'ensemble paysager

Zoza, Altagene, Sorbollano, Cargiaca, Carbini, Zerubia, Loreto-Di-Tallano, Serra-Di-Scopamene, Aullene, Mela, Olmiccia, Levie, Quenza, San-Gavino-Di-Carbini, Zonza, Sainte-Lucie-De-Tallano, Fozzano, Santa-Maria-Figaniella

Constitué d’un d’ensemble de vallons de moyenne montagne au réseau de drainage très ramifié, l’Alta Rocca s’adosse au nord et au nord-est au massif de Bavella-Incudine et au plateau du Cuscionu, au sud-est au massif méridional de l’Ospedale. Ses hautes terres jouxtent au sud et au sud-ouest les vallées du Sartenais, en formant un espace de transition entre celles-ci et les montagnes de la grande chaîne centrale (1-les aiguilles d’Asinao (ou de Bavella) sont un signal et un repère visuel pour une grande partie de l’Alta Rocca).

Enfin, sur sa face ouest, l’ensemble est fermé par des lignes de crêtes qui s’élèvent au-dessus de 1000 mètres : entre les cols de la Vaccia et de Saint-Eustache, les reliefs culminant au Ponti di i Cavalletti (1418 m) isolent l’Alta Rocca de la vallée du Taravu ; un peu plus au sud, les falaises rouges du Monte Rossu (942 m) et de la Punta di u Carbone (1003 m) le séparent de la vallée du Baraci, avec laquelle il communique par le col de la Tana (2).

Les reliefs qui s’étagent de 600 mètres d’altitude environ à plus ou moins 1000 mètres sont assez marqués, et la morphologie tourmentée des vallées, par ailleurs souvent très encaissées, y crée une topographie complexe, avec ses petits plateaux d’altitude (Pianu di Livia, Pianu di Santu), ses vallons secrets et ses innombrables micro-paysages (3,4).

Un maquis préforestier couvre la plus grande partie de ce piémont très boisé. Mais il abrite aussi de magnifiques forêts de chêne vert, des châtaigneraies dans les vallons frais, de nombreuses oliveraies aux abords des villages, tandis que les plus hauts versants s’ornent de formations de pins maritimes ou laricio. En masquant en partie les jeux compliqués du relief, ce couvert forestier dense atténue la rudesse du paysage, en recouvrant les pentes d’un tapis vert aux souples ondulations (5).

Une multitude de petits cours d’eau descendus du plateau du Cuscionu, de Bavella et des contreforts de l’Ospedale arrosent l’Alta Rocca (6).

La plupart viennent grossir le cours du ruisseau montagnard de l’Asinao, qui devient bientôt le ruisseau de Criviscia, puis de Saint-Antoine, avant de prendre le nom de Rizzanese qu’il gardera jusqu’à son embouchure dans le golfe de Valincu. C’est dans cette haute vallée du Rizzanese qu’en 2012 a été mis en eau le plus important barrage de Corse : d’une superficie de 11 hectares environ et d’une capacité totale de 1,3 million de m3, cette retenue hydro-électrique est située dans le piémont de l’Alta Rocca-Scopamena, sous le village de Sorbollano, à peu près à mi-chemin entre Zonza et Zoza. Ce nouvel aménagement a un impact majeur sur le paysage local.
Le substrat rocheux de la Rocca, très présent sous la couverture végétale sous forme d’amoncellements de boules de granite aux silhouettes étonnantes, émerge çà et là du maquis (7).

Dès la préhistoire, les hommes ont utilisé certains de ces chaos granitiques à des fins défensives, en y aménageant de véritables forteresses ou villages fortifiés, habités parfois jusqu’au Moyen-âge. Dans le piémont de Carbini, sur le plateau de Lévie (Pianu di Livia), les ensembles mégalithiques de Cucuruzzu et Capula sont des sites archéologiques et touristiques d’importance régionale.
Le granit est également la matière prépondérante du bâti ancien traditionnel, qui s’exprime admirablement au travers d’une architecture caractéristique dans les nombreux villages et hameaux : appareillage de grosses pierres taillées en moellons réguliers, qualité des parements et des façades construits pour rester en pierre apparente, sans couverture à la chaux systématique. Les villages se sont implantés confortablement sur des replats ou des pentes douces, profitant des événements du relief pour bénéficier d’une orientation favorable (8-Santa Lucia di Tallano).

Ceux qui sont installés le plus bas en altitude sont entourés de jardins, terrasses, prairies et vergers où les oliveraies qui sont progressivement remises en valeur marquent fortement le parcellaire par leurs teintes bleu gris, en contraste avec les verts francs du maquis et des forêts. Dans les bourgs situés plus en hauteur, la châtaigneraie remplace l’oliveraie. Le couvent Saint-François de Santa Lucia di Tallano (XVe-XIXe siècles), l’église Saint-Jean-Baptiste de Carbini (XIIe siècle), la chapelle Sainte-Marie de Quenza (XIIe siècle), font partie des éléments les plus remarquables d’un patrimoine bâti historique qui compte aussi de nombreuses maisons fortes construites depuis le XVIe siècle, ainsi qu’un riche patrimoine rural (fours, moulins, lavoirs…). Les villages de l’Alta Rocca sont reliés par un réseau serré de routes, mais aussi de sentiers pédestres – dont plusieurs boucles du sentier Mare a Mare sud – qui en facilitent la découverte.

Références bibliographiques

Forêts claires et massifs préforestiers du haut Rizzanese, ZNIEFF n°0170, Inventaire du patrimoine naturel corse.

Gilles Giovannangeli, Liliane Giovannangeli, Jean-Paul Laleure, Ghjuvan Battistu Paoli, Sartène et le Valincu, CRDP de Corse, 1999.

Maurin C. Inventaire des sources thermominérales de Corse et valorisation patrimoniale, Rapport BRGM/RP-55916-FR, 161 p., 68 ill., 2 ann., 2007

Bloc diagramme 3D

Sources - IGN / Ortho HR Janvier 2021 / RGE Alti 2020

3.18

A - Piémont de Tallà

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Unités paysagères

Le Tallanais constitue une unité de transition entre le Sartenais et l’Alta Rocca. Cette porte d’entrée dans l’Alta Rocca est marquée par la densification des reliefs et du couvert arboré. Les cours d’eau sont très encaissés dans les vallons aux versants tapissés par les futaies et taillis de feuillus, principalement de chênes verts, d’où émergent des blocs de granite travaillés par l’érosion. La vallée du Rizzanese conserve de nombreuses oliveraies, et quelques châtaigneraies occupent les secteurs les plus frais. Les routes qui traversent l’unité (RD69, RD268, RD20) facilitent la découverte de ses différentes facettes (Les prairies de la plaine du Rizzanese, laissent place aux arrière-plans aux versants tapissés de maquis à chêne vert et chêne liège et de vergers d’oliviers typiques des piémonts de Tallà).

Le fond de vallée du Rizzanese sous Santa Lucia di Tallano est encore relativement ouvert et en partie cultivé (pâturages, vignoble). Il se resserre en aval de Loreto di Tallano, où le fleuve serpente entre les piémonts boisés. Plus haut le cours d’eau a creusé des gorges en contrebas de Zoza, tout comme ses affluents le Chiuvone et la Culiccia sous les villages de Cargiaca et de Loreto (Le lit du Rizzanese sous Loreto, souligné par le liseré de sa ripisylve. Un paysage qui paraîtrait presque totalement sauvage, si l’on n’apercevait quelques clairières, terrasses et maisons à peine perceptibles. En fait les villages ne sont pas loin, cachés derrière les replis des versants).

Le village de Santa Lucia di Tallano se compose de plusieurs hameaux étagés sur les replats du versant, entourés de terrasses jardinées (vergers d’oliviers…). Le profil dense du bâti est en harmonie avec le cadre naturel, comme l’est aussi le style architectural caractéristique de l’Alta Rocca : pierre de taille locale en moellons de granit ajustés au plus serré, toits de tuiles rouges (Santa Lucia di Tallano. En arrière-plan s’élèvent les crêtes rocheuses rouges du Monte Rossu en limite d’ensemble, devant les hauteurs du San Petru et du col Saint-Eustache qui relie le Valincu-Sartenais à la vallée du Taravu).

Sur le territoire de Santa Lucia di Tallano, la source de Caldane, en rive gauche du Fiumicicoli, constitue une curiosité locale. Alimenté par une eau à 40°, la petite piscine à ciel ouvert de Caldane de Tallano est fréquentée par des « curistes » autant que par les touristes.

3.18

B - Piémont de Carbini

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Unités paysagères

La couverture de maquis arboré est omniprésente dans cette unité. Des oliveraies qui retrouvent souvent une nouvelle vie, notamment autour de Livia (Levie) et Carbini, et quelques châtaigneraies, en particulier aux abords de Levie et d’Orone, viennent ponctuellement diversifier le paysage végétal en se mélangeant aux chênes verts de plus en plus prédominants. Les villages occupent des « îlots » sur des replats appuyés aux versants montagneux, séparés les uns des autres par des vallons encaissés. Dans la mer de maquis, leur présence est à peine perceptible. Les routes tendent également à disparaître sous la végétation (Le village de Carbini, posé sur une crête entre deux petits mamelons, se distingue difficilement dans les vagues vertes du maquis).

D’une manière générale, les paysages des piémonts ne se laissent jamais appréhender globalement. Ils se découvrent par séquences, au fil de l’approche par les petites routes sinueuses qui desservent les villages (RD268, RD59, RD67…) ou à pied, par les sentiers balisés. Ainsi, les clairières bocagères, indécelables de loin, révèlent lorsqu’on y débouche tout un micro paysage dont le parcellaire agricole, les murs de pierre sèche, les lisières denses et nettes forment la trame.

Le paysage et les vues ne s’ouvrent qu’au niveau des replats où la topographie a permis d’aménager et de maintenir une clairière, accueillant une prairie, quelques cultures, ou bien un village entouré de ses jardins et vergers en terrasses. D’où une « scénarisation » de la découverte des sites bâtis, qui ne se dévoilent qu’au dernier moment. Quelle que soit leur implantation – étirés en crête ou sur un épaulement, en gradins d’amphithéâtre, assis sur un promontoire… –, les villages se caractérisent par la densité, l’homogénéité de leur bâti et leur qualité architecturale.

Les mamelons et promontoires sont parfois couronnés de chaos rocheux du haut desquels la vue s’étend sur les piémonts boisés. Ces chaos ne sont que l’infime partie émergée d’un univers minéral enfoui sous la forêt. La présence d’énormes blocs de granite revêtus d’un velours de mousses et de lichen crée dans les sous-bois une atmosphère étrange et singulière, comme ici à Cucuruzzu sur le Pianu di Livia.

Le petit plateau (Pianu) de Livia a été occupé très tôt par les hommes. En témoignent les sites préhistoriques de Cucuruzzu et Capula, au cœur de la forêt dense des Cruci. A Cucuruzzu, le complexe monumental daté du deuxième millénaire avant J.C, à l’âge du bronze et du fer, intègre des murs de pierre sèche construits de main humaine dans un chaos naturel de gros blocs de roche granitique. Un sentier bordé de vieux chênes, de pins et châtaigniers mène au site voisin de Capula.

3.18

C - Piémont de l’Alta Rocca – Scopamena

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Unités paysagères

Correspondant aux hautes vallées du Rizzanese et du Scopamène, le piémont d’Alta Rocca Scopamène se situe en amont des deux autres unités, au pied même du massif de Bavella et du haut plateau du Cuscionu. Malgré cette proximité de la haute montagne, le relief se révèle ici moins complexe et moins tourmenté. Comme si nous étions au creux d’une vague qui vient lécher la grande muraille granitique.

Si le couvert végétal est toujours aussi prégnant, et si le chêne vert domine toujours sur de grandes superficies, le paysage s’enrichit des textures et couleurs différentes des pins et châtaigniers. Les reliefs s’adoucissent tandis que le profil des vallées en « V » se fait plus net. Les forêts et maquis préforestiers du haut Rizzanese, typiques des vallées de moyennes montagnes méditerranéennes, ont été classés en ZNIEFF (Dans l’échancrure de la vallée se découpe la silhouette caractéristique des aiguilles d’Asinao / Bavella).

La forêt de pins de Tacca s’étend sur les versants orientaux de l’unité, sous la crête majeure qui sépare l’Alta Rocca du Taravu, franchie par la RD69 au col de la Vaccia. Depuis l’incendie qui l’a ravagé pendant l’été 2009, ce superbe massif forestier offre un triste tableau de désolation (La pinède de Tacca après l’incendie vue depuis le village d’Aullène sur le versant opposé).

L’architecture des maisons reste la même que dans les unités voisines, mais l’habitat se fait souvent plus modeste, et surtout, l’ambiance aux alentours des hameaux et villages change sensiblement : les châtaigniers ont remplacé les oliviers, et la présence de conifères en ornement donne au paysage une touche plus montagnarde (Le hameau de Paciuntuli).

Comme dans tout l’Alta Rocca, les villages de l’unité – Aullène, Serra di Scopamène, Zerubia, Quenza, Zonza, Sorbollano…– vivaient hier au rythme du pastoralisme. Seuls quelques bergeries et leurs pâturages sur les versants attestent encore de la persistance d’une activité pastorale. De leur côté les villages se sont tournés vers l’accueil d’un tourisme de nature profitant de la proximité de la montagne.

Motifs & Enjeux

Aucune donnée définie dans l'atlas
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Motifs & Enjeux