L’ensemble fait partie des grands systèmes de vallées creusées par les rivières de part et d’autre de la grande chaîne intérieure de la Corse, comme autant d’espaces de transition entre la montagne et la mer. En l’occurrence, il s’agit de trois vallées parallèles, de semblable orientation nord-ouest sud-est, débouchant sur la côte orientale dans les plaines d’Aleria (1-Point de vue sur la vallée du Tavignanu vers le sud depuis la RD414 aux environs de Pietraserena. 2-Depuis le village d’Altiani, panorama sur la vallée du Tavignanu et au-delà, sur les crêtes et sommets qui ferment les vallées du Tagnone et du Fium’Orbu).
Malgré l’étendue du territoire concerné, l’ensemble est peu habité. Les villages peu nombreux se sont installés en position haute sur les versants – à l’exception notable de Ghisoni –, en retrait des routes principales (3-Le village de Focicchia).
L’emprise agricole a toujours été réduite, du fait de la faible densité humaine et de la morphologie en « V » des vallées qui n’offre guère de surfaces planes et fertiles favorables aux cultures. Cependant, les sillons du Tavignanu et du Fium’Orbu, grandes voies de passage sur les parcours de transhumance des éleveurs et de leurs troupeaux, ont joué un rôle majeur dans l’économie agropastorale traditionnelle. Ces vallées, et plus particulièrement celle du Tavignanu par où passe la RN200, demeurent aujourd’hui des axes de communication importants entre le cœur de l’île et le littoral. Autre point commun à ces paysages restés dans l’ensemble très naturels : la forte présence du maquis, plus dense ou plus dégradé selon les expositions et les antécédents d’incendies. Son manteau vert sombre recouvre les versants de façon presque continue, ne laissant à la forêt que les creux de vallons et les pentes des hauts bassins du Tagnone et du Fium’Orbu (4-5).
L’unité « vallée du Tavignanu », la plus vaste, correspond au cours moyen de ce long fleuve né du lac de Ninu, à 1 743 mètres d’altitude dans le massif du Cintu. Elle s’étend du pont d’Altiani, marquant la limite avec la plaine du Curtinese, juste en aval du confluent avec le Vecchju, jusqu’au débouché du cours d’eau sur la plaine orientale, où il achève son parcours en allant mêler ses eaux à celles de la mer Tyrrhénienne. Elle englobe au nord-ouest la vallée secondaire du Limone, autre affluent du Tavignanu. Prolongeant la dépression centrale de la Corse (Sillon), cette unité communique avec la plaine littorale par un couloir plus ample et plus direct que ses voisines. Les RD14 et 43 qui desservent les villages, en passant en balcon ou en crête sur les flancs nord et sud de la vallée, proposent de superbes points de vue contrairement à la RN200 confinée en bord de fleuve (6-La vallée du Tavignanu à l’aval du pont d’Altiani).
Intercalée entre le Tavignanu et le Fium’Orbu, la vallée du Tagnone, plus petite que ses consœurs, apparaît également plus secrète, car plus isolée malgré le passage de la RD343 en rive droite. Elle prend naissance sous les crêtes qui relient la Punta della Pinghella (824 m) à la Punta Paglia (1524 m), au-dessus de Vezzani, et englobe le bassin versant du Tagnone jusqu’à la limite de la plaine, où la rivière va grossir le cours du Tavignanu au niveau d’Aleria. Flanquée au nord de versants relativement peu élevés, l’unité est séparée de la vallée du Fium’Orbu par une ligne de hauteurs (franchie par la RD344A au col de Cardu) qui descendent sous les 1000 mètres seulement à proximité immédiate de la plaine.
Enfin, plus au sud, le Fium’Orbu prend sa source dans le massif du Renosu sur le plateau des Pozzi, à 1 800 mètres d’altitude. Le cours moyen du fleuve réunit deux sous-unités aux identités fortement marquées. En amont, sous les pentes du Renosu, la cuvette forestière de Ghisoni, bien qu’enclose par une ceinture de hauts reliefs, constitue un carrefour important de communications. Via le col de Sorba, l’un des plus hauts de l’île (1311 m), elle raccorde la plaine orientale au grand axe de la vallée du Vecchju et au Cortenais. Par ailleurs la RD69 rejoint hors unité le col de Verde (1289 m), au-delà duquel elle bascule vers la vallée du Taravu, en continuité de l’axe du Fium’Orbu. A l’aval, le cours du fleuve s’encaisse dans les défilés des Strette et de l’Inzecca, gorges spectaculaires qui font partie des grands paysages corses. L’ensemble paysager formé par les défilés et le Monte Kyrie Eleison est classé (7,8,9-Défilé des Strette).