Le bassin versant du Vechju, inscrit dans le périmètre du Parc naturel régional de Corse, s’appuie à l’ouest sur les puissants versants du Monte Cardu (2453 m), dernières murailles du massif du Ritondu. Au sud, il remonte la haute vallée du Vechju, jusqu’au col de Vizzavona (1163 m) qui sépare l’En-deçà des Monts (approximativement le département actuel de Haute Corse) de l’Au-delà des Monts (Corse du Sud) ; la superbe forêt de Vizzavona recouvre d’un manteau vert les pentes de ce bassin amont, creusé au pied même du Monte d’Oru (2389 m). La limite de l’ensemble est marquée au nord par une ligne de reliefs qui descend du Cardu vers la plaine du Tavignanu en passant par le col de Bellagranaghju (ou de Belle Granaje, 723 m), au-dessus de Venaco. Et à l’est, il est délimité par une crête majeure reliant du nord vers le sud, à partir du pont d’Altiani sur le Tavignanu, la Punta Muracintu (645 m) au col de Sorba (1311 m). Cet ensemble de moyenne montagne englobe ainsi la quasi totalité du cours du Vechju, depuis la Cascade des Anglais près du col de Vizzavona jusqu’à sa confluence avec le Tavignanu ; seuls en sont exclus la partie la plus haute de la rivière et sa source, inclus dans le massif du Monte d’Oru (1-La forêt de Vizzavona étend son manteau végétal sur la haute vallée du Vechju ; 2-Vue de la basse vallée du Vechju : on aperçoit au fond le village de Vivario, situé au centre de l’ensemble, et en arrière-plan, le col de Vizzavona au pied du Monte d’Oru).
U Vechju se caractérise avant tout par un paysage très forestier. A l’amont de la vallée, adossée au Monte d’Oru et, au sud, aux flancs de la Punta dell’Oriente, la forêt territoriale de Vizzavona (1634 ha) déploie ses vastes futaies de pins laricio et de hêtraies qui abritent des arbres exceptionnels aux abords du col éponyme. Elle se prolonge par les forêts communales de Vivario, Muracciole et la forêt domaniale de Rospa-Sorba, « à cheval » sur les communes de Vivario, Noceta et Rospigliani (3).
Cette ambiance forestière prédomine sur les versants mais aussi en fond de vallée jusqu’au moulin de Tragone. A ce niveau la rivière change de régime : torrent de montagne sous la forêt mixte de hêtres et de pins, jusqu’à ce que le Manganellu vienne grossir son flux, le Vechju s’est enfoncé dans le substrat rocheux à hauteur de Canaglia, creusant des gorges qui descendent au-delà de la confluence avec le Verghjellu. Passé le moulin de Tragone le cours d’eau s’infléchit vers l’est et commence à traverser des sols plus « tendres », principalement de nature schisteuse. La vallée s’élargit quelque peu, ce qui a permis la formation entre le pont de Noceta et le débouché sur la plaine du Tavignanu de petites terrasses alluviales, autrefois cultivées mais aujourd’hui pour la plupart à l’abandon (4).
Cette partie aval du bassin du Vechju présente un visage plus composite que celui de la vallée haute. Les versants sud-est sont tapissés de forêts de pins et d’un maquis dense mêlés de châtaigniers. Ce couvert végétal porte les stigmates d’incendies répétés. C’est sur ce flanc que se sont installés presque tous les villages : Vivario, Muracciole, Noceta et Rospigliano, desservis par la RD343 qui mène à la plaine orientale via Vezzani et la vallée du Tagnone. Sur le versant opposé, le gros village de Venaco aligne ses maisons sous un épaulement du Monte Cardu, comme sur les gradins d’un amphithéâtre (5).
Au-dessus du bourg, la châtaigneraie qui prospère sur ces pentes plus abruptes et plus fraîches laisse vite la place à la végétation de montagne. Sous Venaco le substrat change : les schistes remplacent le granite du Cardu, et à la chênaie verte s’associent quelques châtaigneraies et surtout des peuplements de chêne pubescent. En fond de vallée, on retrouve un maquis plus ou moins dégradé par les incendies qui colonise les espaces ouverts en bordure du fleuve. D’une manière générale, le maquis et la forêt ont reconquis l’essentiel des anciennes surfaces agricoles, l’élevage restant la seule activité significative. Si quelques terrasses en limite des villages accueillent encore jardins ou vergers, la plupart sont enherbées. Ces espaces tampons entre les paysages bâtis et les paysages naturels mériteraient une remise en valeur.
L’ensemble est traversé par les principales voies de communication entre Ajaccio et Bastia : la RN193 et la ligne de chemin de fer permettent, chacune à leur façon, de découvrir les paysages de la microrégion comme une suite de séquences (la forêt, la montagne, les villages, les gorges…) aux ambiances très différentes qui s’enchaînent sur un mode quasi cinématographique. De son côté la RD343 tout au long de son parcours en balcon offre des vues panoramiques sur la vallée et les massifs du Monte d’Oru et du Ritondu. Les cols – Vizzavona, Bellagranaghju sur la RN193 ; Campu di Lupu (824 m), Bocca di Murellu (824 m) sur la RD343 – ménagent des points de vue particulièrement spectaculaires. C’est aussi le cas du verrou rocheux sur lequel se dresse le fortin de Pasciolo, au-dessus de Vivario, au point d’articulation de la haute et de la basse vallée.