Dans le détroit des Bouches de Bonifacio, la plupart des îles, îlots et récifs sont groupés en petits archipels. Ces formations émergées appartiennent au socle granitique, commun à la Corse et à la Sardaigne, mis en place avant la dérive qui a séparé le bloc corso-sarde du continent européen. Ainsi, comme les Cerbicale, l’archipel des Lavezzi témoigne de la parenté géologique des deux grandes îles tyrrhéniennes, reliées l’une à l’autre lors de la dernière période glaciaire (Würm, entre -70 000 et -15 000 ans). Les hommes du paléolithique pouvaient probablement rejoindre à pied sec les Lavezzi depuis la côte bonifacienne (1-Des îlots de granite entre Corse et Sardaigne ; 2-Les falaises de Bonifacio se découpent au nord des Lavezzi).
La petite île Lavezzi, qui a donné son nom à l’ensemble, se situe désormais dix kilomètres au large. L’archipel se compose également d’une île plus importante – Cavallu (120 ha) –, de quatre îlots satellites – Porragia, Ratinu, Piana et Sperduto – et d’une centaine d’écueils et de récifs, dont celui des Lavezzi, point émergé le plus au sud de la Corse, et donc de la France métropolitaine.
Comme dans la majorité des îles corses, les hommes ont laissé de nombreux témoignages de leur passage. On a découvert dans les Lavezzi des abris sous roche néolithiques et prénéolithiques, les vestiges d’un port et d’une carrière datés de l’époque romaine (Ier-IIIe siècles), ainsi qu’une chapelle paléochrétienne (VIIe siècle). Plus récentes, deux nécropoles et une stèle en forme de pyramide commémorent le naufrage de la frégate Sémillante, en 1855, dans cette passe considérée comme l’une des plus dangereuses en Méditerranée ; le phare a été construit en 1874 à la suite de la catastrophe. Autre trait commun insulaire : le pastoralisme, pratiqué jusque tard dans le XXe siècle, a contribué à façonner le paysage végétal (3-La nécropole blanche des naufragés de la Sémillante, lieu de souvenir émouvant au centre de l’île Lavezzi ; 4-Le phare de Lavezzi).
Les deux îles principales connaissent aujourd’hui des destins divergents. Cavallu, la seule habitée, partiellement construite et totalement privatisée, est devenue un symbole de l’accaparement d’une part croissante du littoral par les puissances de l’argent.
L’île Lavezzi et le reste de l’archipel ont été quant à eux classés réserve naturelle en 1981, puis intégrés en 1999 dans la Réserve naturelle des Bouches de Bonifacio, partie française du Parc marin international corso-sarde. Ce classement protège un paysage et des écosystèmes très originaux (5-Au sud-est des Lavezzi se profile la silhouette des îles du Parc national de l’archipel de la Maddalena, partie sarde du Parc marin international des Bouches de Bonifacio).
Les Lavezzi sont à juste titre réputées pour leur décor minéral de granite de teinte claire, qui se prolonge sous la mer en chaos rocheux où abondent mérous et coraux, et pour leurs criques aux eaux turquoise. Elles conservent une faune – en particulier avicole – et une flore étonnamment riches au vu des dimensions de ces « mouchoirs de poche » (6-Entre les chaos granitiques, les touffes grises et jaunes des immortelles et les ombelles blanches des œnanthes colorent au printemps la végétation des replats, mosaïque de pelouses et de fruticées basses littorales).
Seul bémol, l’archipel est devenu un but d’excursion exploité de façon intensive par les navettes maritimes au départ de Bonifacio. Chaque été, les rotations des « sorties en mer » débarquent sur l’île Lavezzi des cohortes de touristes si nombreux qu’ils soumettent le site à forte pression, malgré les réglementations en vigueur (7-Des ganivelles protègent du piétinement des visiteurs une dune d’arrière plage).
