Lorsque le libecciu, le grand vent d’ouest, lave le ciel du Cap Corse, l’île de la Giraglia semble toute proche. Impression trompeuse : ce n’est pas tant la distance à la côte (1,4 km) qui tient ce haut et long rocher éloigné du rivage, que les courants violents qui agitent la passe et entraînent vers le large le nageur ou le plaisancier imprudents. D’ailleurs s’agit-il bien d’une île ? Vue depuis le petit port de Barcaggio ou les hauteurs de la pointe du Cap Corse, ce millefeuille de schistes verts et noirs culminant à 66 m au dessus de la mer, évoque plutôt un grand vaisseau échoué ou un monstre marin échappé de quelque bestiaire fabuleux. La nuit venue, 100 kilomètres à la ronde, le phare blanc de la Giraglia, l’un des plus puissants en Méditerranée, fait de l’œil aux navigateurs.
A Zerlaia, l’« île aux jarrets », comme la nommaient les Cap-Corsins, était autrefois un site de pêche très fréquenté. La terre la plus septentrionale de l’archipel corse occupait en outre une position hautement stratégique, au débouché du golfe de Gênes. Il reste de l’occupation humaine pluriséculaire les ruines d’une chapelle et d’un oratoire, la tour carrée édifiée par les Génois en 1585, les vestiges d’une batterie côtière remontant à Napoléon 1er et le phare mis en service en 1848.
Depuis l’automatisation du feu en 1992, la Giraglia n’est plus habitée, sinon par des colonies d’oiseaux de mer qui y trouvent la tranquillité indispensable à leur nidification. L’île battue par les vents et les houles est devenue un sanctuaire de nature intégré à la zone spéciale de conservation (ZSC) « Îles Finocchiarola, Giraglia, Capense et Cap Corse » du réseau Natura 2000.